Paris : Square Alban Satragne, un jardin et sa fontaine bigarrée, mémoire de la prison de femmes Saint Lazare puis de l'hôpital Saint Lazare -Xème



Les fontaines publiques, longtemps seules sources d'approvisionnement en eau des Parisiens, sont devenues, au fil des siècles et de la progression des infrastructures, éléments de décoration. Désormais, elles agrémentent places et espaces verts pour le plaisir. L’apaisante musique du ruissellement de l’eau chante le retour des beaux jours jusqu’aux premiers frimas. Si la plupart se parent des grâces du néo-classicisme haussmannien, les fontaines modernes gagnent peu à peu le cœur des habitants par leur originalité. C’est le cas de la fontaine du square Alban Satragne, à quelques encablures de la Gare de l’Est, quartier populaire par excellence. Lieu propice au  loisir et à la contemplation et dont l’air de jeux est particulièrement appréciée des enfants du quartier, des populations très hétéroclites s'y croisent. Une halte crèche, un centre social, un centre culturel, un gymnase, et une bibliothèque occupent une partie des terrains, un jardin et une école maternelle au nord de la parcelle. Pourtant, l’histoire du square Alban Satragne, créé en 1963, se rattache à des auspices moins heureux et le souvenir de la prison Saint Lazare, ancien hospice devenu centre de détention à la Révolution, rasé dans les années 1930 et remplacé par un hôpital aujourd'hui disparu. 


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Les 3400m2 du square sont situés sur l’emplacement de l’ancienne prison Saint-Lazare - probable déformation de Saint-Ladre - une léproserie transformée en 1791 sous la Révolution en prison, antichambre de la guillotine.  Talleyrand-Périgord, l’abbesse de Montmartre, le peintre Hubert Robert ou le poète André Chénier y furent enfermés. A partir de 1795, elle n’accueille plus que des femmes dont les plus célèbres locataires sont Louise Michel, Mme Steinheil (maîtresse de Félix Faure, accusée à tort du meurtre de son mari), Mme Caillaux ou encore Mata Hari. 

Par la suite, cette institution voit passer essentiellement des prostituées arrêtées sur la voie publique pour racolage. Désaffectée en 1932, puis démolie en 1935, la Ville de Paris bâtit sur les terrains libérés l’hôpital Saint-Lazare qui ferme à son tour en 1998. De la prison, il demeure quelques vestiges visibles au fond du jardin, l’infirmerie et la chapelle toutes deux construites en 1824 par l’architecte Louis-Pierre Baltard, père du célèbre Victor Baltard qui travailla aux côtés du baron Haussmann durant la période des grands travaux de transformation de Paris sous le Second Empire.


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En 1990, alors que l’hôpital Saint-Lazare est toujours en activité, la municipalité décide d’offrir au square une fontaine colorée en mosaïque à laquelle font écho des bancs et des murets ornés de motifs chamarrés afin d’en animer les lieux jusque là plutôt moroses. L’architecte Jean-Luc Giraud est chargé de concevoir les nouveaux aménagements. 

Pour la fontaine, les mosaïques réalisées par l'artiste céramiste Michel Duboscq en 1992, s’inspirent des oiseaux lunaires de Joan Miró réalisant des motifs en céramique dont les couleurs primaires chatoient sous le flot d’une eau jaillissant en fins jets au sommet d’un cône. Les volatiles du quartier y prennent grand plaisir. Les pigeons du pigeonnier municipal tout proche se sont appropriés cette jolie création pour en faire leur spa privé. Ils s’ébrouent avec ravissement dans l’onde claire, spectacle saisissant et presque charmant - il s’agit tout de même de pigeons pas de mignons petits moineaux. A l’entrée du parc, se trouve un étrange bassin à sec paré de murets aux mosaïques de la même eau. Terrain de boules ou partie secondaire de la fontaine dont la fonction première aurait été détournée, je n’ai pas trouvé de renseignements précis à ce sujet.

Square Alban Satragne 
107 bis rue du Faubourg Saint Denis - Paris 10
Métro Gare de l'Est lignes 4, 5, 7


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