Cinéma : Every Thing Will Be Fine de Wim Wenders - Avec James Franco, Charlotte Gainsbourg, Marie-Josée Croze, Rachel McAdams - Par Didier Flori



Dans la campagne canadienne, Tomas (James Franco) est un écrivain qui traverse une crise. Il recherche une inspiration qui peine à venir et ses relations avec sa compagne sont tendues. Alors qu’il roule sur une route désolée par temps de brouillard, il percute un enfant. Dès lors son destin bascule et va se tisser en parallèle de la famille endeuillée de sa victime,  sa mère Kate (Charlotte Gainsbourg) et son frère Christopher.






Après avoir rencontré le succès du côté du documentaire avec Pina et Le Sel de la Terre, César 2015 du meilleur documentaire, Wim Wenders revient à la fiction épaulé par un casting prestigieux. Si le pitch du film pouvait faire craindre le mélodrame lourd, le réalisateur nous offre au contraire un film gracieux et élégant qui parvient à créer une belle et sobre émotion. 

Le scénario de Bjørn Olaf Johannessen est en fait l’occasion pour Wenders de revenir sur une des thématiques qui traverse son oeuvre, le rapport à la famille et à la paternité au coeur de Alice dans les villes, Paris Texas ou Don’t Come Knocking. Every Thing Will Be Fine traite de la solitude de Tomas et de la difficulté de ses rapports avec les autres, et les brefs gestes d’affection qu’il partage avec sa compagne du début du film (Rachel McAdams) ou son père (Patrick Bauchau) n’en sont que plus poignants.







Se déroulant sur 12 ans, le film suit les trajectoires intimes de ses personnages et parvient à capter avec justesse quelque chose du passage du temps qui avance sur le rythme lancinant de la magnifique bande originale d’Alexandre Desplat. La narration lacunaire et les sauts dans le temps peuvent créer un sentiment de frustration, d’un sens qui échappe. Cependant l’intérêt est maintenu par la mise en scène assurée de Wenders et les images sublimes du directeur de la photographie Benoît Debie. Les scènes autour de la maison de Kate, inspirées par les peintures de Andrew Wyeth, sont l’occasion de véritables tableaux où les personnages réduits à l’état de silhouette apparaissent dans toute leur fragilité. Face au passage éphémère dans l’existence qui est le lot de chacun, les gros plans sont l’affirmation de la force de la vie intérieure et de l’imagination, capables d’abolir les barrières de l’espace comme l’illustre une très belle scène au téléphone entre Tomas et Kate. Le choix de la 3D afin d’accentuer la présence des acteurs à l’écran, de nous faire  partager le même espace qu’eux, contribue à la visée chaleureuse et humaniste de Every Thing Will Be Fine.




Oeuvre aux belles intentions et parfaite esthétiquement, le film de Wenders n’en souffre pas moins de quelques longueurs et faiblesses. La réflexion sur la position de Tomas en tant qu’artiste, son détachement apparent avec le monde qui l’entoure, tombe ainsi un peu dans les lieux communs. On aurait en outre souhaité que les femmes entourant Tomas soient d’avantage développées, tant ce personnage principal conservera jusqu’à la fin un caractère hermétique qui le rend peu attachant.

Every Thing Will Be Fine de Wim Wenders
Sortie le 22 avril 2015
Avec James Franco, Charlotte Gainsbourg, Marie-Josée Croze et Rachel McAdams


Cinéphile averti, Didier Flori est l’auteur de l’excellent blog consacré au cinéma Caméra Critique que je ne saurais trop vous conseiller. Egalement réalisateur et scénariste, c’est avec ferveur qu’il œuvre dans le cadre de l’association Arte Diem Millenium qui soutient les projets artistiques de diverses manières, réalisation, promotion, distribution… Style ciselé, plume inspirée et regard attentif, goûts éclectiques et pointus, ses chroniques cinéma révèlent avec énergie toute la passion qui l'anime